L’Education
L’impasse écologique, sociale et économique dans laquelle nous a plongés notre système de développement nous oblige à revoir notre modèle de société et à refonder notre contrat social sur des bases très différentes. Ce défi exige que l’on renoue avec le projet d’émancipation des lumières fondé sur l’éducation et qu’on en fasse un outil de cohésion sociale pour que l’on soit en mesure de mobiliser et produire de l’intelligence partout où il y en a besoin en fonction des singularités et des besoins locaux.
Nous devons en effet passer d’un monde où l’intelligence est majoritairement distribuée de façon centralisée, à un monde où l’intelligence, les connaissances et les idées sont produites de façon diffuse au plus près des situations des différents acteurs ou, plus exactement, à un monde ou le système s’auto-organise à différentes échelles en fonction des nombreux défis auxquels il a à faire face. Il est donc impératif de repenser les finalités et les contenus de nos programmes d’éducation et de formation en fonction de ces nouvelles exigences et tout particulièrement du défi écologique.
Les questions qui se posent sont nombreuses : que doit-on apprendre aux jeunes et aux moins jeunes ? Pourquoi ? Comment ? Où ? Sur quelles bases faire évoluer la formation tout au long de la vie ? Comment faire pour coller aux nouvelles exigences ? Et bien d’autres choses encore. De nombreux acteurs ont bien sûr engagé des réflexions autour de ces différentes questions. Ils ont compris la nécessité de contribuer à la formation de citoyens éclairés, imaginatifs, coopératifs, entreprenants, désireux de prendre soin du monde dans lequel ils habitent et aptes à faire face aux enjeux glocaux de la transition. Mais faute de bien percevoir la radicalité des changements auxquels nous sommes appelés, faute aussi de nous entendre sur un nouveau projet de société, nous assistons à des ajustements de programme à la marge loin des enjeux de la transition. Si nous devons par exemple réellement passer du schème de la domination à celui de la considération, il va notamment falloir transformer en profondeur nombre de nos repères sociaux, de nos pratiques, de nos usages, de nos modes d’organisation, de nos modes de relation au vivant non humain.
Outre la nécessité de désapprendre bien des choses, l’école doit aussi sortir du tout intellectuel en développant l’imagination, les capacités d’empathie, les habilités manuelles, la découverte de soi, le rapport aux arts. Eduquer c’est aussi faire découvrir le plaisir d’apprendre, de comprendre, de se dépasser et de construire ensemble. Ces différents enjeux mettent en exergue deux exigences fondamentales : celles de la liberté et celles de la coopération. Il nous faut en effet former des adultes libres, émancipés, conscients de réalités et en capacité d’agir, et donc de contribuer à la création de forces de vies, au plus près de leurs besoins individuels et collectifs.
Face à ces nouveaux enjeux, il s’agit non seulement de revoir les modes de gouvernance de notre appareil éducatif, mais aussi d’en réviser radicalement les finalités, les méthodes et les programmes. L’heure n’est plus aux transformations par le haut dont la faillite est consommée. Elle est à la multiplicité des niveaux d’engagement, de formes novatrices d’initiative et d’organisation pour agir au plus juste des problématiques rencontrées aux différents niveaux d’action. Cela passe par un renouvellement profond de nos modes d’éducation.
Nous soutenons le manifeste “Repenser l’éducation par et pour les territoires“, émis par le collectif “osons les territoires”, qui en appelle à un débat démocratique autour de la nécessité de refonder notre éducation.