La résilience

La résilience est un concept polysémique largement galvaudé qui peut sembler bien pauvre et limité à certains. Il n’en est rien. S’il répond à différentes définitions contrastées parfois ambiguës, il ouvre aussi à des perspectives en parfaite adéquation avec les différents défis à relever dans le monde à venir à partir du moment où on le considère dans la plénitude de son sens.

Le concept de résilience vient de la physique et indique le degré de résistance d’un métal à un choc, et donc sa capacité à retrouver sa forme initiale.

Il s’est tout d’abord élargi à des conceptions plus psychologiques pour indiquer la capacité d’un être vivant à résister à un choc traumatique ou à rebondir après une épreuve difficile. Il s’est ensuite transformé sur ces bases en une nébuleuse de sens au sein de divers domaines comme l’économie, les constructions physiques, la gestion des risques, les sciences sociales, les sciences du vivant et les logiques écosystémiques. Dans ce cadre plus élargi, il a été aussi mobilisé dans un sens socio écologique pour indiquer la capacité de nos organisations à faire face à des bouleversements majeurs, des problèmes d’insécurité, à des risques naturels ou plus largement aux risques encourus face au réchauffement climatique et à la chute dramatique de la biodiversité.

Dans le sens socio-écologique, qui nous intéresse ici, la résilience peut être interprétée ou conçue de deux façons : comme un résultat ou un processus. Dans le premier cas, elle renvoie à la capacité d’un ouvrage à résister à des vents violents ou la capacité d’un organisme à survivre à une privation d’eau ou la capacité d’un territoire à se reconstruire à la suite d’une catastrophe (sociale, économique, écologique …). Sous cette forme, elle est souvent vue comme un retour à l’état d’origine, c’est-à-dire aux équilibres anciens. La résilience vue comme un processus dynamique ne postule pas le retour à l’équilibre initial, mais la progression vers un nouvel état d’équilibre permettant de mieux faire face aux crises en devenir. Elle inclut non seulement l’aptitude à se réparer, mais aussi la capacité à apprendre des événements pour mieux s’en prémunir par la suite (y compris en agissant sur les raisons de la crise). Cette résilience dynamique est très proche du concept de robustesse défendu par Olivier Hamant dans son livre Antidote au culte de la performance (cf. Bibliographie Générale) qu’il définit comme la capacité à se maintenir, s’adapter ou se transformer dans un environnement instable et évolutif. Elle allie la capacité à résister sur ses bases à celle de conduire en permanence les changements adaptatifs nécessaires à une évolution dans un environnement instable et incertain … qui sera de plus en plus notre réalité de demain. Elle plaide pour un développement dynamique sur fond de crises successives (capacités d’adaptation et d’apprentissages). La résilience prend la société pour ce qu’elle est : un ensemble écosystémique qui a la capacité de se transformer en apprenant de lui-même, mais aussi un ensemble qui a la capacité d’agir sur son environnement (ou les causes des crises auxquelles il est confronté) pour mieux se transformer avec lui.

Ce concept s’oppose au culte de la performance qui est la principale signature de notre modernité (volonté d’aller aller toujours plus haut, toujours plus vite, toujours plus loin par la force de nos capacités technologiques au mépris des équilibres sur lesquels la vie s’est construite) et de la domination qui traversé nos différentes civilisations, mais que la modernité a instrumenté pour la mettre au service de la performance.

(Crédit Images – Open IA – sous licence Creative Commons Attribution 4.0 (CC BY 4.0) )
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